Dans un message posté sur son mur facebook, le journaliste Olivier Mukuna s'interroge sur le poids des Africains dans le paysage médiatique mainstream. Parlant du traitement réservé à l'homme au défunt père de Yannick NOAH dans le journal télévisé de France 2, il déclare en substance :" c'est "ça" notre place médiatique ? 19 secondes."
Cette interrogation souligne, s'il en était encore besoin, la nécessité pour les professionnels des médias africains de travailler à la construction de leurs propres médias alternatifs...
Dix-neuf secondes
Fin de JT sur France 2. Le présentateur Laurent Delahousse annonce un biopic de Dalida qui sort dans les salles mercredi prochain. Récit sur un "incroyable destin", ses "chansons qui sont la bande-son de sa vie", sa "solitude". L'implication de l'actrice, incarnant la chanteuse, affublée d'un faux-nez et qui a supporté 3 heures de maquillage par jour. Durée du sujet : 6 minutes 15 secondes...
Delahousse enchaîne avec "une image et un hommage" sur le décès "qu'on vient d'apprendre" de Zacharie Noah, père de Yannick. Pas de sujet. Diffusion d'images d'archives et voix off du présentateur. Avec un débit à 150 à l'heure, Delahousse souligne la joie de Zacharie Noah lorsque son fils a gagné Roland Garros en 1983. Il ajoute que le père fût "un grand sportif" qui "a gagné la coupe de France en 1961" avec l'équipe de foot de Sedan. Durée : 0 minute 19 secondes...
Alors j'ai pensé à 2 choses.
En disparaissant, c'est "ça" notre place médiatique ? 19 secondes. Le père camerounais du dernier français qui a gagné Roland-Garros depuis 34 ans, du Français qui a dirigé l'équipe de France victorieuse de la Coupe Davis, du Français dont le fils est un excellent basketteur de la prestigieuse NBA, du Français qui a longtemps caracolé en tête du palmarès des "personnalités préférées des Français".
La disparation de son père, connue depuis la matinée sur les réseaux sociaux, ne vaut même pas un sujet. Juste 19 secondes.
Je me suis ensuite souvenu de ce garçon de 13 ans qui avait regardé avec son père la finale Noah-Wilander ; qui, comme père et fils Noah, avait sauté dans les bras de son père après la balle de match victorieuse ; qui, pour la première fois, éprouvait un tel sentiment de fierté de se reconnaître, à la télé, en même temps que son père. Ce garçon, c'était moi. Qu'ont pu penser les ados de 13 ans en voyant aujourd'hui ces 19 misérables secondes ?
Zacharie Noah n'était pas qu'une image. C'est toute une histoire de l'immigration subsaharienne, c'est une des histoires de la lutte contre la négrophobie française, c'est une histoire de transmission familiale dans laquelle nombre de citoyens métissés peuvent se reconnaître. C'est un hommage que n'a pas cru utile de rendre le service public blanc de France Télévisions.
Crédit publication : Olivier Mukuna, Journaliste indépendant
Hommage à Zacharie Noah
Né au Cameroun, le père de Yannick Noah avait remporté la Coupe de France avec Sedan en 1961. Il est mort à Yaoundé, dimanche, à 79 ans.
Zacharie Noah, qui avait remporté la Coupe de France avec Sedan en 1961, est mort dimanche 8 janvier à Yaoundé, au Cameroun, à l’âge de 79 ans, a annoncé son fils, Yannick Noah, sur Twitter.
« Ce dimanche matin à Yaoundé, Zacharie Noah nous a quittés, paisiblement dans son sommeil. Il est parti entouré de toute sa famille », a écrit Yannick Noah sur son compte Twitter. Zacharie et Yannick Noah, pour le grand public, c’est avant tout une image : celle d’un père enlaçant son fils quelques secondes après sa victoire en finale de Roland-Garros en 1983, et ce avant même que Yannick ne puisse serrer la main de l’arbitre.
Ce dimanche matin à Yaoundé Zacharie Noah nous a quitté, paisiblement dans son sommeil. Il est parti entouré de toute sa famille.
— Yannick Noah (@NoahYannick) 8 janvier 2017
Zacharie Noah était descendu des tribunes, en tombant au passage, pour pénétrer sur le court central et étreindre longuement son fils en larmes, déjouant le service de sécurité.
Patriarche d’une dynastie de sportifs professionnels, il était également le grand-père de Joakim Noah, joueur de NBA chez les New York Knicks.
Né le 2 février 1937 à Yaoundé, alors sous domination française, Zacharie Noah était arrivé en France à l’âge de 13 ans, à Saint-Germain-en-Laye chez sa sœur et son beau-frère pour y faire ses études. Il commença sa carrière de footballeur au poste de défenseur, au sein du Stade Saint-Germain en 1956, avant d’être recruté par Sedan, alors en première division et l’un des clubs phares des années 1960 en France.
« J’ai eu le nez d’y aller, alors qu’on me le déconseillait fortement à cause de la rigueur du climat et de la mentalité des gens de la région. (…) J’ai préféré Sedan aux propositions faites par le Red Star, le Racing Club de Paris et le Stade Français », confiera-t-il plus tard. Il fera toute sa carrière sous la direction de Louis Dugauguez à Sedan, avec qui il remportera notamment la Coupe de France en 1961, au détriment de Nîmes. C’est d’ailleurs dans cette ville que naît Yannick, après deux filles (Isabelle et Nathalie), de son union avec Marie-Claire Noah, une institutrice des Ardennes.
Au sein des Sangliers, il est estimé pour son élégance, sa solidité, ses interceptions, son adresse, son jeu de tête et sa souplesse. Victime d’une fracture du bassin, Zacharie Noah est contraint d’arrêter le football, à seulement 25 ans. Il avait ensuite suivi avec attention la carrière de son fils, jusqu’à son sacre en 1983, le dernier d’un Français en Grand Chelem.
Lors d’un passage à Sedan en novembre 2003, Yannick Noah s’était confié sur son père : « Très souvent, dans le cas où un des parents a fait une carrière professionnelle, le fils a envie de faire autre chose, de prendre le contre-pied. Mon papa jouait au foot, moi j’ai décidé de jouer au tennis, mon fils joue au basket, peut-être que son fils jouera aux billes. »
(Source: lemonde.fr )Nos condoléances
La rédaction AfroPolitis présente ses condoléances les plus attristées à la famille NOAH, et à l'Afrique toute entière, qui perd ainsi un de ses valeureux fils.
Puisse t'il reposer en paix, et puissent les divinités fortifier et bénir toute la famille !
Par K-Wad Moov'In